Je suis une maman active, dynamique, pleine de joie.
Mon travail nécessitant ma présence, je continue de travailler lors du premier confinement. Pour éviter toute contamination, lorsque je rentre chez moi après mes journées de travail, je me désinfecte les mains et vais changer mes vêtements et les mets à laver chaque jour, tout comme mon mari.
Le 21 mars je suis contaminée par la Covid 19. A ce moment-là, je n'aurais jamais pensé qu'aujourd'hui, le 13 mars 2021, je serais dans l'incapacité de travailler, de courir, ou même de vivre un quotidien normal.
J'ai d'abord cru ,comme beaucoup, que c'était comme une grippe. Un peu de fatigue, de fièvre mais avec le repos ça passerait.
Mais voilà que je perds le goût et l'odorat, j'ai mal à la tête, je me sens fébrile, et je suis fatiguée. Alors, je consulte mon médecin traitant qui me met en arrêt.
En rentrant à la maison j'annonce à mon mari et mes enfants de 15 ans que c'est très probablement la Covid-19. Comme conseillé par le médecin, je m'isole, et me repose. Je n'ai pas faim, je suis fatiguée. Une de mes filles désinfecte la maison du sol au plafond.
Par chance mes enfants sont suffisamment grands pour être autonomes, mais aussi faire à manger, les tâches quotidiennes qu'elles effectuent avec mon mari.
Et là commence l'isolement dans la chambre conjugale. Personne n'ose entrer. Le plateau repas m'est déposé devant la porte. Je préviens avant de sortir, ne serait-ce que pour aller aux toilettes ou prendre une petite douche rapide car je suis faible. Le sentiment d'être en prison. Je suis fatiguée, alors je dors quasiment toute la journée et je suis toujours aussi fatiguée.
Le temps passe et mon état s'améliore, alors le 20 avril je reprends le travail. Le 21 avril, je sens une douleur thoracique, un essoufflement lorsque je chante, car oui je chante à mon travail. Je suis fatiguée, je n'ai pas faim, je perds tout doucement mon énergie. Et puis tout s'intensifie.
Je retourne chez mon médecin traitant, qui m'annonce que c'est reparti, enfin ce n'était pas fini.
"Nous allons nous voir souvent" m'a t'il dit, moi qui habituellement voit le médecin une fois par an pour un certificat médical pour le sport.
Ma saturation baisse, je cherche mon air, cette pression thoracique fait peur. La sensation de brûlure dans l'œsophage est désagréable. La sensation d'avoir inhalé de la javel est présente constamment dans mes narines.
Mon mari étant au travail, j'essaie de ne pas trop inquiéter mes enfants. Mais il est difficile de respirer. Une chose est sûre, je ne veux pas aller à l'hôpital. Je suis trop jeune. Je ne veux pas mourir. Je ne regarde plus les informations. Tout ça m'angoisse.
Alors je vois mon médecin traitant régulièrement. Trois tests PCR effectués, tous négatifs. Tous faits de façon différente. Le temps passe. Je reprends le travail à mi-temps thérapeutique fin mai. Quatre heures par jour. Ça va. Et puis l'été passe, et en septembre je reprends mon travail à temps plein.
Je n'ai plus la même énergie, mais les premiers jours ça va. Et puis au bout de quelques jours, je me sens plus fatiguée qu'à mon habitude, mais je continue, je me dis que mon corps a perdu l'habitude.
Dernière semaine de septembre, je me sens très fatiguée, mon cœur palpite de façon anormale, rapidement et fort.
Le 1er octobre 2020, je suis prise subitement de très fortes palpitations. Mes collègues me conseillent de m'asseoir. Me voilà finalement couchée au sol. Et puis démarrent des tremblements de la tête aux pieds. Je ne maîtrise rien. On me dit de me calmer. Je réponds: " Je suis calme, je ne sais pas ce qui se passe, je ne maîtrise pas". C'est horrible cette sensation de ne pas maîtriser son corps. Les tremblements se calment, je peux respirer... 1 minute et tout recommence. Les palpitations, les tremblements, les pleurs comme une fontaine qui jaillit. J'ai peur. Mais que se passe t-il ?
Et cela pendant une bonne heure. Mon mari arrive. Le voir me rassure tellement mais j'ai tellement peur en même temps. Que va t il m'arriver ? Est-ce la dernière fois que je le vois ?
Je suis emmenée par une ambulance aux urgences. Là bas, je suis examinée, on me fait une prise de sang. Les résultats de retour annoncent que tout est normal. Une fois de plus. Alors je peux rentrer. Un médecin me propose cependant de voir une infirmière en psychiatrie. Pourquoi ????
Mon malaise a été qualifié de crise d'angoisse.... Je rentre chez moi avec des antidépresseurs et un suivi chez un psychologue.
Mais l'histoire n'en est pas terminée pour autant. A partir de là les choses vont s'enchaîner.
Je passe beaucoup de temps à me reposer encore et encore. J'essaie de reprendre la course à pied, ça ne peut que m'aider à aller mieux. 7 kms!!!! Je suis contente j'ai réussi à augmenter mes distances progressivement... jusqu'à ce que tout bascule à nouveau. Arrive fin novembre, et je ne me sens pas bien. Je suis prise de vertiges, de douleurs articulaires aiguës, de douleurs musculaires. Et puis je fais un malaise. 6h30 du matin, j'ai mal à la tête, très mal au ventre. Alors je me lève, je vais aux toilettes.
J'ai chaud, je transpire, tout tourne autour de moi. Alors je me lève pour aller me recoucher, je me tiens au chambranle de la porte, et lorsque je rouvre les yeux, je suis allongée au sol sur le carrelage dans le couloir avec le regard apeuré de mes filles qui me regardent et mon mari venu en catastrophe. Que s'est il passé ? Pourquoi suis-je par terre ? Mon mari me demande si ça va, je ne sais pas trop. Il veut appeler les pompiers. Je lui dis d'attendre, que ça va passer. Un peu plus tard, il me met dans notre lit.
Je me repose et vais voir mon médecin traitant dans la journée.
A partir de ce jour-là, il y aura un certain nombre de malaises avec ou sans perte de connaissance, même le jour de Noël. Pourtant je ne fais rien de mes journées et je porte des bas de contention depuis le 2 octobre 2020.
Début janvier 2021, nouvelle année, je me dis que ça va aller mieux, mais c'était vite dit.
Ça recommence, malaise, pompiers, urgences, "tout va bien Madame, vous pouvez rentrer chez vous". Non, tout ne va pas bien! Pourquoi je fais des malaises à répétition, pourquoi des hématomes apparaissent le matin et ont disparu le soir ? Pourquoi mes doigts se bloquent ? Pourquoi tout cela m'arrive! Pourquoi moi ?
Je ne suis plus moi même depuis plusieurs mois, j'ai perdu cette joie de vivre, cette énergie, mes envies.
Mon médecin traitant cherche, élimine les pistes au fur et à mesure, et est bien obligé d'admettre que même si mes examens sont bons jusqu'à présent, que je suis touchée par le Covid long.
Nous sommes le 13 mars 2021, j'enchaîne les examens, les spécialistes. Ma vie est rythmée au rythme des rendez vous médicaux, à mes rendez vous chez le kiné, chez la psychologue. Tous m'aident beaucoup. Mais personne ne sait combien de temps cela va durer. On me dit d'être patiente, je le suis, même si parfois c'est difficile.
Il y a des soirs où je ne peux pas me sécher les cheveux, je dois demander de l'aide, mes bras sont trop lourds. Il y a des jours où je ne peux pas pas tresser les cheveux de mes filles quand elles me le demandent, mes bras sont trop lourds. Il y a des jours où je ne peux pas prendre la voiture, trop de vertiges. Il y a des jours où je me réveille et je me rendors aussitôt pour la matinée. Bref, je veux bien être patiente, mais ma vie n'est plus la même depuis bientôt un an.
Et puis il y tous ces gens qui ont besoin d'avoir une preuve médicale de ce qui m'arrive, qui ne comprennent pas que même avec des tests négatifs, c'est la Covid.
De plus, je suis arrivée en fin de droits pour le maintien de mon salaire, donc, à ce jour, je ne perçois plus que les indemnités journalières de la Sécurité Sociale... Comment va t on faire ? Il y a la maison à payer, la voiture, la cantine, le bus, et tout le reste. Comment encore une fois, demander aux enfants de comprendre qu'il va falloir faire le minimum. Je culpabilise beaucoup mais que puis-je faire ?
Impossible pour moi de reprendre le travail vu tout ça. Les jours où tout va bien, je peux les compter sur les doigts d'une seule main depuis 6 mois.
Alors que fait-on pour nous les Covid long??? Et surtout que les médecins arrêtent de dire que ca va passer, car ils n'en savent rien.